TAKASHI MASUBUCHI/AYAMI SUZUKI/TAKASHI TSUDA

RASENKIRYŪ

OTOOTO, CD – 2025

Enregistré à Permian, un des nouveaux lieux actifs pour les nouvelles musiques à Tokyo, Rasenkiryū réunit trois improvisateurs issus des nouvelles générations pour une performance de deux heures : Takashi Masubuchi (guitare acoustique), Ayami Suzuki (voix, électronique) et Takashi Tsuda (guitare électrique, archet électronique, objets). La musique proposée ici est à sa façon dans la continuité d’Onkyo, notamment à travers le jeu de Masubuchi qui rappelle celui de Taku Sugimoto : une même façon d’accueillir le silence, de poser quelques rares notes entre de grands espaces blancs. Takashi Tsuda joue lui comme en retrait, dessinant dans l’arrière-plan des lignes de feedback à l’aide de son e-bow. Seul le chant d’Ayami Suzuki se place dans un autre plan, dans une évidence mélodique qu’Onkyo a peu investi. La voix se déroule au-dessus des deux guitares, comme le souffle du vent sur un pré d’herbes rares, elle recueille les notes des deux guitaristes, les enveloppe et les lie ensemble. Masubuchi et Tsuda sont comme deux calligraphes jetant d’un trait sûr des tracés bruissant sur de grands aplats blancs, à la façon de kanjis sonores. Cette approche de l’improvisation est très éloignée de ce qui a fondé les débuts de l’improvisation européenne, qui pour rester dans les analogies à la peinture évoquait plutôt Jackson Pollock. Tous deux sont dans une grande économie du geste, dans la lenteur, l’attention. Les arpèges de Masubuchi se posent sur le fil tendu de Tsuda et retiennent l’auditeur dans des phrases hypnotiques, dans la répétition de motifs déconstruits, canevas mouvants sur lesquels Ayami Suzuki peut improviser, partir, rêver.

Michel HENRITZI

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